Laurent – Construire son projet

Je suis en reconversion professionnelle, et après des petites expériences à droite et à gauche, chez divers maraichers de la région, j’ai eu l’opportunité de rentrer aux Jardins de Cocagne.

 

Je suis salarié comme les autres salariés en insertion mais j’ai un statut un peu particulier, car je suis aide-encadrant maraicher. Mon objectif, c’est de m’installer comme maraicher dans mon exploitation ou de travailler comme maraicher dans un autre Jardin du réseau des 110 Jardins de Cocagne.

 

Grâce aux Jardins de Cocagne, je peux faire une saison complète de maraichage pour acquérir des connaissances, m’aguerrir. C’est important de faire une saison complète par rapport au travail saisonnier et la vision parcellaire qu’on a en ne travaillant sur des missions au printemps, à l’automne, l’été mais jamais sur une saison complète.

 

Je n’avais pas l’habitude d’être encadrant, car dans mon boulot, j’étais seul, j’étais commercial, donc, travailler aux Jardins, ce sont des compétences supplémentaires que je trouve très intéressantes et très enrichissantes parce que j’aime bien travailler en équipe, j’aime bien le contact humain.

 

Si je dois m’installer un jour, je ne vais pas m’installer tout seul, je veux m’installer en association, peut-être même avec d’autres maraichers ou des agriculteurs, ou d’autres personne qui font des activités liées à la terre : des apiculteurs, des paysans-boulanger, … Mon but serait donc de rentrer dans une structure ou de créer une structure.

 

Aux Jardins, j’ai pu faire un bilan de compétences complet, et ça m’a permis de voir que cette opportunité d’aller vers l’encadrement me correspondait, donc c’est positif du point de vue insertion. Du point de vue maraichage, le fait d’être présent sur le terrain tout le temps, de pouvoir participer à certaines décisions, à l’organisation, à la gestion des équipes, à la gestion du travail, à la gestion des priorités, ça me conforte dans l’idée d’aller dans ce métier.

 

Le maraîchage, c’est un outil pour remotiver les gens pour le travail, pour l’envie de travailler, même si la plupart des gens ne souhaitent pas devenir maraicher comme moi. Quand on est employé, ou qu’on travaille pour son propre compte, il faut se lever le matin, arriver à l’heure au boulot, être attentif aux consignes, les appliquer le mieux possible, et comme on travaille en équipe, apprendre, réapprendre ou essayer d’améliorer ses relations avec les autres.

 

J’ai un stage à faire où je vais intégrer un domaine où ils sont plusieurs associés. Il y a du maraichage, de l’élevage, il y a de la fabrication de produits laitiers, il y a des céréales aussi. Je dois aller voir cette structure pour mieux connaître le niveau organisation du travail, relation humaine entre les associés.

 

J’aimerai bien aussi aller voir une autre structure des Jardins de Cocagne pour voir la fonction d’encadrant, cela me permettra de voir autre chose et comment cela se passe ailleurs et voir ce qui me correspond le mieux.

 

Pour un salarié en insertion, pour que cela se passe bien, c’est comme dans tout métier, il faut s’intéresser à ce qu’on fait, ne pas hésiter à poser des questions. Comme on est sur des équipes assez grandes de 25, 30 personnes, il ne faut pas hésiter à poser des questions aux encadrants, parce que si on fait quelque chose et qu’on ne comprend pas pourquoi on le fait, c’est un peu frustrant. C’est démotivant. Comme c’est un métier assez spécifique, que peu de personnes connaissent, il ne faut pas hésiter à poser des questions. Comme dans tout métier, quand on sait ce qu’on fait et qu’on s’y intéresse, même si on ne l’aime pas au départ, surtout que le maraichage, c’est très physique, il y a moyen de s’épanouir, et en faisant bien sa démarche d’insertion, de recherche d’emploi, trouver une formation qui nous correspond, on fait tout pour que le passage dans les Jardin soit un succès pour la personne.

Laurent – Construire son projet2021-04-07T06:35:00+02:00

Betty – tous les jours, j’apprends à découvrir les gens

Les Jardins, c’est de belles rencontres d’abord, avec des gens très différents de ceux que j’ai l’habitude de voir. Je suis là depuis 4 mois, j’ai commencé dans les champs, ensuite, j’ai fait un petit peu de serres et maintenant, ça fait 2 mois que je suis aux paniers et aux livraisons. C’est bien, comme c’est mon objectif de faire des livraisons. Ça fait 2-3 ans que j’essaye de trouver un métier qui me passionne autant que l’ancien que j’avais lorsque je conduisais des poids-lourds. Un métier qui me passionne autant que chauffeur routier, c’est pas évident de trouver. Parce que je veux me poser. Faut que je trouve ma voie, ma nouvelle voie comme je dis, et c’est pas évident.

 

Au Jardins, je leur dis ce qui me passionne. Je sais que je ne sais pas trop parler, ils me mettent parfois en relation avec des gens, alors j’apprends parce que c’est pas mon truc de parler aux gens, d’avoir le contact avec le client, c’est pas mon truc. C’est pas évident pour moi. Voyez, là j’apprends à travailler en groupe, normalement, j’aime bien travailler toute seule. Quand je suis arrivée, c’est ce que je leur ai demandé, un poste où je suis toute seule, et autonome, bien sûr. Et en fin de compte, je suis autonome, ils me font confiance, mais le plus dur pour moi, c’est de travailler en groupe. J’apprends encore, j’apprends. Je ne suis pas trop contact humain. Je me suis forcée et finalement, j’ai trouvé certaines personnes sympas. Et puis, j’ai découvert ce que c’était que d’échanger avec ces gens qui n’ont pas du tout à voir avec mes amis. Là, c’est vraiment vaste, on a plein de gens différents, avec des parcours différents, c’est important aussi de voir ça. Et puis des fois quand je me plains, je me dis je n’ai pas à me plaindre, quand je vois ma vie, ça va. La seule chose c’est qu’il faut que j’arrive à trouver ma voie, ça va être ça le plus dur.

 

On a chacun nos caractères, nos façons de faire les choses et tout ça. Tous les jours j’apprends, sur les gens, sur la façon de travailler en groupe. Travailler en groupe, ça a été vraiment dur pour moi. Avant mon patron, je le voyais le matin, des fois le soir si je ne gardais pas le camion. Ici, je les vois passer toute la journée. Tout ça c’est des changements pour moi. On m’a proposé des formations, mais je ne peux pas rester enfermée. Il me faut de l’espace. Là, j’ai trouvé, on fait plein de choses différentes, c’est ça ce que j’aime bien. Les serres, les champs, les livraisons, les paniers, on ne fait jamais la même chose. Il y a quelques jours, ils ont senti qu’on avait besoin d’air, avec ma coéquipière, et bien, on nous a mis au champ et on était les plus heureuses du monde. C’est tout bête, mais on était super contentes. On avait besoin de ça, de faire un break dans la salle à paniers, alors, hop, on demande de faire autre chose et c’est reparti !

 

4 mois, c’est pas énorme. Le temps qu’on arrive, qu’on prenne ses marques, qu’on apprenne à connaître plus ou moins les collègues avec lesquels on va travailler, ça prend facilement 2 mois. Après, ils ont vu qu’on était relativement autonome avec les paniers, on est des super championnes ! Il y a des collègues qui ne s’imaginent pas les responsabilités qu’on a. Il faudrait qu’ils viennent et qu’ils se rendent compte. Pourtant, il faut faire attention à ce qu’on fait. On livre des clients. Moi, j’aime bien quand les clients sont contents et qu’on leur donne de bons produits. Pour moi, c’est important. On verra bien ce que cela donne, mais pour l’instant, les clients ne se plaignent pas trop.

 

Ce qui a déclenché mon changement de relation avec les gens, c’est qu’ils sont venus vers moi. Ils m’ont raconté des morceaux de leur vie et je me suis dit, en fin de compte, ma vie elle n’est pas si minable que ça. Je croyais que l’être humain et moi on n’était plus amis. Que c’était terminé et tout, et, en fin de compte, je me rends compte qu’ils me plaisent ces gens-là. Ils en veulent. La seule chose, c’est de trouver un métier qui me soit aussi passionnant que l’ancien, c’est le seul truc. Ma vie personnelle, ça va. Mais quand je les entends parler, c’est compliqué pour eux. Ils sont intéressants, je trouve. Ils m’apportent, faut pas croire. Même si je vis différemment d’eux ou que eux vivent différemment de moi, on s’apporte beaucoup de choses mutuellement, au moins, pour moi. Et comme ils continuent à me parler et à me taquiner et tout, c’est que je leur apporte aussi. Ils vont me manquer quand je vais partir, faut pas croire, mais ça, vous ne leur dites pas, hein !

Betty, salariée en insertion

Betty – tous les jours, j’apprends à découvrir les gens2021-04-07T06:34:13+02:00

Bénédicte – une équipe, un accompagnement, une structure pour des valeurs et du sens

Ma motivation à postuler au poste de directrice des Jardins de Cocagne de Mâcon

Je suis arrivée en poste en février 2014 portée par une forte motivation à poursuivre ma carrière en cohérence avec mes valeurs et mon goût pour la relation humaine, la relation d’aide et l’écologie.

Les Jardins de Cocagne y répondaient car ils allient plusieurs dimensions, l’écologie, l’insertion sociale et professionnelle et, ce qui était nouveau pour moi et très important à mes yeux, l’Insertion par l’Activité Economique, qui plus est par le maraichage biologique. Tous les critères étaient donc réunis.

J’ai toujours pensé, grâce à mon expérience au travers des activités sociales et médicosociales que j’ai pu exercer aussi bien dans le champ de la prévention que de l’insertion, que le retour à la terre était vraiment très important et très structurant pour les gens. En effet, pour des personnes qui ont pu perdre le goût voir le sens de leur vie suite à des échecs et à des difficultés dans leur parcours tant personnel que professionnel, cela peut avoir beaucoup de sens et de vertus que de travailler la terre.

Une activité structurante et qui a du sens pour nos salariés en contrats aidés.

Notre activité de maraîchage bio est, en tant que telle, structurante comme l’est aussi conjointement l’accompagnement que nous apportons aux salariés en insertion. Sans le cadre que nous apportons, sans l’accompagnement que nous mettons en place concernant leur projet personnel et professionnel, nous n’aurions pas les mêmes résultats. L’activité économique proposée chez nous aux jardiniers est également concrète, visible et saine. Les salariés peuvent constater le résultat de leur travail. Ce n’est pas le cas dans toutes les entreprises et dans toutes les activités. Ici, ils travaillent la terre, préparent les sols, plantent les graines, les arrosent,  les voient pousser, en prennent soin. Puis ils récoltent les légumes arrivés à maturité, les nettoient, les mettent dans les paniers, font les livraisons, vendent sur les marchés et ont le contact direct avec les clients. Ils vont ainsi jusqu’au bout de la chaine. En plus, ce que nous produisons est naturel. C’est bio et c’est bon pour l’homme et l’environnement.

Tout le monde a besoin de se nourrir correctement, c’est essentiel. Pourtant nos vies sont de moins en moins connectées à la nature, à la terre… C’est pour cela que je parle d’ancrage ! La terre est vraiment quelque chose qui nous ancre tous. Le fait qu’en plus nous soyons en  bio  apporte encore plus de valeur. Les salariés en insertion savent que les légumes sont bons, qu’on n’a pas besoin de les éplucher, de les nettoyer plus d’une fois avant de les consommer, et qu’on n’empoisonne pas les gens ni la nature avec ceux-ci. Nous sommes dans un cercle vertueux. Si nous leur expliquons bien et qu’ils le perçoivent, ils comprennent le sens que cela a pour eux même et pour les autres et cela confère encore plus d’importance et de valeur à ce qu’ils font.

Les critères pour entrer comme salarié en contrat aidé aux jardins

Pour réussir son parcours au Jardins de Cocagne, il faut de la motivation. Nous leur demandons au moment du recrutement quelle est leur motivation à y entrer. Nous leur précisons bien que nous n’attendons pas nécessairement qu’ils nous disent « je veux devenir maraicher ». L’essentiel, c’est la motivation qu’ils ont à travailler sur leur projet professionnel et personnel et à vouloir s’en sortir. Cela  veut donc dire qu’ils doivent être prêts à opérer des changements chez eux, à entendre le travail qu’il va falloir faire sur les freins à l’emploi qui peuvent être de plusieurs ordres : santé, mobilité, l’absence de qualification,  manque d’expériences, de compétences, manques dans les savoirs de base (lire, écrire, compter), etc … Cela peut être également relever de freins psychologiques comme «  j’ai peur de conduire », « je ne me sens pas capable »…L’ensemble de ces freins,  il va falloir petit à petit les lever.

 Le recrutement

L’information collective que nous faisons au départ est là pour leur donner toutes les informations et répondre à leurs questions. Ensuite arrive l’entretien individuel. C’est là que nous évaluons le degré de motivation de la personne. Nous essayons de poser un premier diagnostic avec elle. Puis, les maraichers, l’accompagnatrice socioprofessionnelle et la directrice se concertent sur les candidatures et retiennent celles qui leur semblent les plus adaptées. La personne est ensuite recrutée et prend le statut de salarié en contrat CDDI (Contrat à durée déterminée d’Insertion).En même temps que la signature du contrat de travail, le salarié signe également un contrat d’engagement réciproque. Il s’engage ainsi à accepter l’accompagnement que nous allons lui proposer et, de notre côté, nous nous engageons à l’accompagner pour lui permettre de réussir son projet professionnel et personnel.

Les premières étapes du parcours d’accompagnement vers l’emploi

Au début, l’accompagnatrice socio professionnelle va leur faire réaliser un bilan de compétences qu’elle adapte en fonction du profil des personnes et de leur capacité à lire, à écrire et à restituer leur parcours. Chaque projet est harmonisé à chaque personne et nous travaillons sur les freins qui sont spécifiques à chacun(e). Les jardins de Cocagne ont choisi de proposer 7 mois de durée pour le 1 er contrat, parce que cela nous permet d’avoir un mois de période d’essai. Si cela ne va pas pendant la période d’essai, nous préférons arrêter là le contrat. En effet, si en un mois les gens ne sont pas capables de tenir une motivation, ils ne la tiendront pas sur 7 mois ni sur un an. C’est que ce n’est pas encore le bon moment pour eux. C’est important pour nous d’être très clairs au départ, d’être très transparents, d’être très fermes aussi et de démarrer l’accompagnement et les démarches d’insertion dès le 1er mois. Nous sommes parvenus avec l’équipe d’encadrement et d’accompagnement à mettre vraiment cela en place aux Jardins.
Nous sentons très vite si la motivation est là ou pas. Nous acceptons les difficultés des gens, nous les écoutons, nous les entendons.  Ils nous apportent leurs arguments, nous leur apportons les nôtres et nous les renvoyons aussi sans cesse à la réalité de ce que les employeurs vont attendre d’eux à l’extérieur. Nous les stimulons aussi beaucoup. Mais, si nous nous apercevons au terme des 7 mois qu’il n’y a aucun effort fait par le salarié sur le plan du projet professionnel et personnel et sur son implication à lever ses freins à l’emploi, même si celui-ci fait son travail sur le versant de l’activité de production, nous préférons ne pas renouveler. Le contrat aux jardins est en effet un contrat spécifique. Ce n’est pas un simple CDD. Il y a le «  I » de l’Insertion qui doit vivre et se mettre en place avec le salarié afin qu’entre l’avant et l’après jardins, il se soit passé quelque chose de positif pour lui et qu’il aille vers une sortie dite «  positive (emploi d’au moins 6 mois, CDI ou formation qualifiante reconnue par les entreprises).

On parle souvent dans nos métiers d’empathie. L’empathie c’est être à l’écoute de l’autre mais cela ne veut pas dire être forcément d’accord avec tout et dire oui à tout. Aux jardins nous pratiquons l’écoute empathique mais structurante, toujours structurante.

Le parcours en CDDI peut durer au maximum 2 ans (durée de l’agrément donné par Pôle Emploi). Aux jardins, nous préférons annoncer d’emblée que nous ne renouvèlerons pas le contrat au terme d’un an de présence. La raison essentielle est que  nous souhaitons qu’ils maintiennent une véritable dynamique  de recherche d’emploi et qu’ils ne «  s’endorment pas sur leur contrat aux jardins ». L’objectif est en effet qu’ils trouvent autre chose à la sortie qui soit plus pérenne pour eux.

Le réseau des jardins : Le partenariat et les bénévoles.

Même si cela n’est pas toujours facile dans le contexte actuel, nous devons concevoir notre rôle en cohérence et en continuité avec les autres intervenants. En effet, il arrive souvent que nous passions le relais à d’autres structures afin de mettre en place des actions spécifiques qui vont permettre d’aider nos salariés. Je pense notamment aux personnes qui ne maitrisent pas le français du tout et qui n’ont pas été scolarisées dans leur pays. Pour ces personnes parfois illettrées ou analphabètes, cela est très compliqué de pouvoir avoir une sortie positive en 2 ans vers une formation qualifiante ou un emploi.. Nous travaillons beaucoup avec LUTILEA, un organisme extérieur qui forme des bénévoles qui vont ensuite accompagner les personnes qui ont des problèmes d’illettrismes et d’analphabétisme.

LUTILEA  a formé récemment des adhérents des jardins qui s’étaient  proposés afin d’être bénévoles pour accompagner nos salariés. Nous avons maintenant beaucoup de nouveaux bénévoles, dont c’est la 1ère expérience. Ils ont été formés par LUTILEA afin de leur donner les compétences nécessaires et ils viennent de commencer des accompagnements individuels chez nous. Nous allons voir au fur et à mesure comment cela se passe mais j’entends les salariés dire qu’ils sont contents et pour moi c’est beaucoup.

Nous savons qu’il faut du temps, et du temps, chez nous, il n’y en a souvent pas suffisamment. Ce n’est pas en 1 an ou 2 ans, avec un public illettré ou analphabète que nous allons faire des miracles, mais on peut avancer. On peut donner cette envie d’avancer aux gens pour continuer après, parce que LUTILEA peut continuer après nous avec eux.

Nous essayons de toute façon pour tous qu’il y ait un relais qui soit pris à l’extérieur après le passage aux Jardins de Cocagne

Comment je vois l’avenir des jardins ?

Nous sommes arrivés, non sans mal, à asseoir une structure qui a les bonnes bases pour continuer à se développer. Tout n’est pas gagné mais il y a un bel équipement, une bonne équipe, un bon conseil d’administration qui œuvrent main dans la main et vont de l’avant. Cependant tout est fragile. Nous avons toujours des inquiétudes concernant les financements. Nous avons cependant encore une marge de progrès réalisable concernant la commercialisation. C’est pourquoi nous cherchons à développer nos ventes paniers. La production bio en France répond aux attentes qu’exprime la population de mieux se nourrir. Elle est d’ailleurs encore très insuffisante par rapport à ce que pourrait être la demande des consommateurs. Plus ça va aller et plus les consommateurs vont être exigeants au sujet de ce qu’ils mangent. Aussi, Je n’ai aucuns doutes sur l’avenir des Jardins de Cocagne. En effet, nous répondons à tous les critères. Nous faisons du bio, du local, et du solidaire. C’est dans le sens de l’avenir.

A la question quel est pour moi le lieu, le moment ou les éléments emblématiques des jardins ? Je répondrai spontanément : le forage et les hommes et les femmes qui œuvrent aux jardins.

 Pourquoi le forage ? Parce que cela a été un dossier et un projet difficile, qu’il a fallu monter,  tenir, argumenter, défendre auprès des différents financeurs. Le point de forage, c’est le symbole de la vie pour les Jardins. Pourtant, il y a eu un moment où nous avons perdu tout espoir de trouver l’eau car il ne restait que 2 tubes de 3m au foreur avant d’atteindre la limite de la profondeur qu’il pouvait forer. Nous avions déjà atteint le niveau impressionnant de 160m et l’eau n’était pas là ! Nous n’avions aucun plan de secours satisfaisant. Nous étions très inquiets pour les cultures à venir et nous savions que nous devrions faire face à des répétitions de canicules liées au réchauffement climatique qui risquaient de nous impacter très fortement. Les 2 tubes restants ont permis d’atteindre le niveau de la rivière souterraine à 166 m !!! 

Cela a  été un tellement bel aboutissement quand l’eau a jailli le vendredi 13 novembre 2015 vers 12h00 !!!  Le V de la Victoire, c’est le geste que j’ai fait sur la photo prise à cet instant devant le forage. C’est vous dire ma joie partagée bien sûr par tous !

Oui, le point de forage et l’eau qui jaillit, c’est ce qui sauve une culture. On ne peut pas faire de maraichage sans eau.  Et c’est pareil pour les personnes que nous accompagnons, nous cherchons à faire jaillir  la source qui est en eux.

Les hommes et les femmes qui œuvrent aux jardins. En effet, on ne fait rien sans les êtres humains. Il y a l’équipe des permanents, les administrateurs, les bénévoles, les salariés en insertion. Sans cette implication, cette convergence de vue et l’activité de ces personnes il ne se passerait pas grand-chose. On aurait un forage, oui bien sûr, c’est essentiel pour la culture. Cependant il faut des hommes et des femmes pour travailler et rendre tout cela fructueux. Il faut toute la mécanique humaine pour donner corps et  sens à ce que l’on fait.

Bénédicte – une équipe, un accompagnement, une structure pour des valeurs et du sens2021-04-07T06:33:06+02:00

Doralis – un endroit qui a changé ma vie et où je me suis retrouvée

Je suis aux Jardins depuis un an. Je suis cubaine et je suis arrivée en France en 2012. De tous les emplois que j’ai eu, c’est ici, aux Jardins où je me suis retrouvée, parce que l’ambiance est conviviale, il y a le mélange de différents pays. Il y a tout, des français, des cubains, des argentins, des marocains, … Tout ça me rappelle ma culture. J’aime bien travailler la terre aussi, ça me rappelle là-bas.

Travailler aux Jardins m’apporte beaucoup de choses, le moral, l’envie d’avancer, on nous encourage beaucoup à faire le métier que nous voulons faire plus tard, on a la possibilité de partir en stage, de travailler en remplacement. Mon projet personnel, c’est de travail dans les structure Maisons de Retraite. J’ai déjà fait des stages en maison de retraite et en tant qu’employée à domicile. J’ai aussi eu la possibilité de faire des remplacements à l’hôpital en tant qu’agent hospitalier. Et ça s’est bien passé. Le projet, c’est de partir avec des formations et du travail. On est très bien guidé sur le chemin pour l’avenir.

Avec les Jardins de Cocagne, je fais la préparation du code de la route avec LUTILEA, J’ai appris pas mal de panneaux, je n’ai jamais conduit de ma vie, c’est difficile, mes notes ne sont pas les meilleures, mais ne sont pas les pires, non plus. J’apprends beaucoup de choses ici, par rapport à la difficulté que j’ai par rapport à la langue française. Avec les autres collègues aussi, on a tous les mercredis après-midi des bénévoles très gentils, qui viennent nous apprendre le français, et l’informatique. Il y a pas mal de possibilités que nous découvrons. Je me sens bien ici, on s’entend bien avec les collègues les uns les autres, ça se passe bien.

Ici, je suis comme si j’étais à Cuba, je me sens bien, il y a du dynamisme. Bon, c’est 2 ans maximum. Pendant ces 2 ans, ils essayent que nous ne partions pas sans rien, une formation ou un travail, quelque chose, pas sans rien. Je trouve cela très très bien de la part du côté administratif. Je suis contente. Je pense repartir d’ici avec quelque chose parce que déjà j’ai fait un remplacement à l’hôpital et deux stages à domicile et tout s’est très bien passé.

Je voudrai travailler dans une structure, travailler avec des personnes. J’ai déjà travaillé, j’ai l’expérience, …Comme je suis trop gentille avec les gens, il faut que j’apprenne à garder un peu plus de distance professionnelle, mais sinon, ça va. C’est pour cela que j’aime bien ce travail, je me sens utile, de pouvoir les aider.

La difficulté, c’est mon accent surtout, nous parlons très vite dans mon pays à Cuba. Le conseil en France, c’est qu’il faut articuler, il faut parler doucement, je n’ai pas l’habitude d’articuler, l’articulation, c’est important, mais bon, petit à petit, j’apprends. Les bénévoles qui travaillent ici sont là pour nous aider. Le mercredi, j’apprends la conjugaison, tous les verbes, l’écriture, la lecture, je me débrouille pas mal en écriture, en lecture, et j’essaye de me faire comprendre.

Le travail d’équipe, c’est important, il faut bien organiser l’équipe dans les champs, dans la récolte, mais ça se passe très bien. Le matin, le patron il distribue le personnel aux endroits où nous devons aller, et ensuite, chaque équipe fait sa partie. Et ça aussi, ça change parce que nous ne sommes pas tout le temps dans le même poste. Une personne qui a fait la récolte, demain peut-être elle sera dans la serre ou à semer, pour que chacun fasse un peu de tout. Finalement on passe par tous les postes.

Ça me plait tellement, ça a changé ma vie, quand je partirai, j’emmènerai un joli souvenir du travail que j’ai fait aux Jardins de cocagne, de mon expérience, de travailler la terre, j’aime bien. Ça a changé ma vie parce que c’est un endroit où je me suis retrouvé moi-même, un endroit communicatif, j’en avais besoin, tout simplement. Je voulais changer un peu, changer de culture. Retrouver, je ne sais pas comment le dire en français, un poco de agitación, de dinamismo, de sonrisa, (un peu d’animation, de dynamisme, de sourire).

Note : le texte de l’entretien a été légèrement adapté pour faciliter la lecture, notamment en adaptant le français

Doralis, une salariée en insertion

Doralis – un endroit qui a changé ma vie et où je me suis retrouvée2021-04-07T06:32:11+02:00

Jean-François – une équipe et des talents

En ce moment, c’est l’époque du désherbage, parce que presque toutes les cultures d’automne sont déjà en place. On a donc beaucoup de désherbage à faire et un peu de plantation de salades (chicorée, scarole, frisée, batavia).

A l’extérieur, la culture de plein champs, on fait encore quelques semis directs. Un semi direct, c’est lorsqu’on met la graine directement dans la terre sans repiquer. C’est le cas des navets, des radis noirs, des radis longs, par exemple. Il reste aussi, bien sûr, encore beaucoup de récoltes à faire.

En septembre, il va y avoir beaucoup de choses dans les paniers. On aura du potimarron, des haricots en grain, des haricots verts, toujours des tomates, des aubergines, des poivrons, des salades, des oignons, de l’ail, de l’échalotte, peut-être un peu de chou. Je ne veux pas trop m’avancer parce que je ne suis pas sûr, ça dépend de la nature.

Et il y aura plein d’autres choses, bien sûr : des pommes de terre, des carottes, du céleri, des courgettes, des pâtissons. Et des aromates aussi. En plein champ, à partir du début octobre, on ne plante plus rien, à part l’ail qu’on laisse tout l’hiver.

Sous les serres, nous sommes en train de défaire les cultures de printemps, et de réimplanter les cultures d’automne. Donc, par exemple, en août, on a planté des haricots, pour le mois d’octobre. Réimplanter, c’est-à-dire qu’il faut d’abord nettoyer la serre et la remettre en culture avec des nouveaux légumes. Donc on commence par travailler le sol puis faire des plantations. On a commencé par les haricots, puis, autour du 15 août, on a planté la mâche pour l’avoir autour de fin octobre. On a vraiment un gros travail à faire autour du nettoyage des culture pour les enlever et replanter ensuite de nouveaux légumes. C’est un travail qui va nous occuper jusqu’à début décembre sous les serres.

Je pense que nos adhérents se rendent compte qu’il y a plus de variétés de légumes qu’avant. Par exemple, l’hiver, on fait des endives, ça plait aux gens car c’est ce qu’ils attendent. Tous les maraichers ne font pas des endives parce que c’est une culture où il faut désherber, comme la carottes, et cela prend du temps. Ce qui est bien aux Jardins de Cocagne, c’est qu’on a une équipe, il y a du monde. Bien encadrée, le boulot se fait plus facilement et ça nus permet de faire certains légumes, comme les endives, qu’on ne ferait pas autrement. La culture de l’endive est une culture technique. C’est une culture qui est longue et qui sort de l’ordinaire. Ce n’est pas une légume qu’il suffit de semer et de récolter ensuite, comme la carotte. Avec l’endive, on cultive en deux temps, d’abord la racine puis ensuite le chicon. Ça commence en pleine terre, dehors, et ça continue après en chambre tempérée en hiver. On déterre la racine et on va la réimplanter dans des bacs avec de la terre et de l’eau dans le noir pour que l’endive ne soit pas amère. Dans le temps, les anciens faisaient un trou et mettaient les endives sous des feuilles. C’était physique.

Cette année, on aura au moins autant d’endives que l’année dernière. Donc, on devrait en trouver au moins une fois par mois dans les paniers. Si il y en a plus, on les mettra sur les marchés. Dans le futur, vous savez qu’on devrait avoir un nouveau bâtiment où il y a aura plus d’espace et une serre tempérée. En hiver, avec cette serre, on aura des endives, bien sûr, et en été, j’aimerai bien faire des champignons. On ne pourra pas faire de la pleurote, parce que c’est très compliqué, car il faut beaucoup d’hygiène et un suivi très précis. On fera plutôt des champignons de Paris, c’est plus simple, moins délicat à cultiver.

Pour finir, un mot de la fête des 20 ans des Jardins de Cocagne. Pour les 20 ans, on va nettoyer, tondre, désherber la cour. Le fait que les jardiniers soient invités, ça crée une dynamique pour eux. Ils sont les acteurs des Jardins. Si ils ne sont pas là, il n’y a personne. Ils sont assez contents et ils vont s’impliquer. Je les ai sentis assez enthousiastes. Il y a des bonnes équipes en ce moment. Les jardiniers sont assez motivés. Ça aide vraiment au bon fonctionnement des Jardins.

Ils seront donc mobilisés pour tout mettre en place. Ils vont notamment tenir le stand de légumes. Certains prévoient de faire des petites animations, mais c’est eux qui décident et je garde la surprise. Mais nos jardiniers ont du talent. Alors, on verra…

Jean-François – une équipe et des talents2021-04-07T06:30:47+02:00

Jean – Bénévole, c’est du bonheur

Mon rôle de bénévole aux Jardins de Cocagne est d’apporter un complément, parfois même plus qu’un complément, de formation aux Jardiniers. Je donne des cours de français ou de mathématiques, mais cela va bien au-delà de cela. Les Jardiniers sont des gens qui sont sous contrat aux Jardins de Cocagne, ils sont employés et rémunérés par les Jardins de Cocagne, mais ils sont dans le cadre d’un contrat aidé, c’est à dire qu’ils fournissent un travail qui leur est rémunéré mais aussi ils ont l’obligation de suivre une formation, parce que les Jardins de Cocagne n’est pas seulement un producteur comme les autres, c’est aussi un moyen d’insertion ou de réinsertion et ça s’est important car cela figure véritablement dans leur contrat. Les gens que je prends, on s’est choisi mutuellement, même si ils sont obligés de venir travailler avec moi ou avec n’importe lequel des autres bénévoles puisque maintenant on est une équipe assez nombreuse.

Je suis venu aux Jardins en tant que client. On est venu avec ma femme une fois et on a dit qu’on voulait prendre des paniers et en discutant avec la directrice, on a eu l’occasion de lui dire que cela faisait des années qu’on faisait de l’enseignement et que si elle avait besoin ou les Jardins avait besoin de nos services, on était disponible. Ça s’est fait presque tout de suite.

La plupart du temps, les Jardiniers que l’on forme sont d’origine étrangère, même si il y aussi des français. Ce sont des gens qui ont des difficultés avec la langue. Faut vous dire que aussi dans leur cursus aux Jardins de Cocagne, ils vont avoir des tests à passer et des tests d’embauche et leur premier écueil, c’est de pouvoir réussir ces tests, et c’est à quoi je m’attache. La 2ème spécificité c’est qu’on a un temps très limité puisqu’ils ont un contrat renouvelable 2 fois. Donc il y a un peu une course contre la montre. Il faut s’adapter à chaque personne, à chaque besoin.

Ils parlent parfois des langues totalement différentes de la structure de nos langues, et derrière, il y a l’impossibilité pas lire les plaques, le nom des rues, ne pas bien connaître notre monnaie quand ils vont au marché. Ils sont toujours sur le fil du rasoir, et ça c’est des demandes, c’est un sentiment d’insécurité et parfois, beaucoup plus, un sentiment violent d’être mis au rebut parce que je ne connais pas la langue, et ça on le sent. Mais on ne peut pas intervenir directement, en disant tu as besoin de ceci, tu as besoin de cela, mais il faut qu’on essaye d’adapter notre enseignement, notre façon d’être avec eux de façon à essayer de leur apporter une réponse aux questions angoissantes qu’ils se posent.

Et ça c’est extrêmement important. Ici ils sont dans un milieu relativement sécurisé et sécurisant. C’est aussi une des spécificités des Jardins de Cocagne.

J’ai travaillé tout l’été, notamment avec un jeune avec qi j’ai commencé le 27 juillet pour la 1ère fois. Il y en a un autre que je n’ai pas vu depuis largement plus d’un mois, parce qu’il était en congés et maintenant il est en congé de maladie, et honnêtement, ça me manque. C’est un gars qui a de réelles possibilités et des connaissances, mais qui ne sait pas les exploiter, qui ne sait pas les exprimer. J’ai un autre jeune, actuellement, qui n’a jamais été à l’école, il a 24 ans, il est tout fou, il est passé par la rue, ben, ça aussi c’est important. Ici, il est véritablement, en ré-insertion, c’est à dire, qu’il réapprend à dormir dans un lit, à ne plus être dans la rue, à ne plus subir la violence de la rue parce que c’est un milieu extrêmement violent, il a à réapprendre les horaires parce qu’ici, en été, ils commencent à 7h00 et ils finissent à 13h00. Et moi, je l’ai connu au début où ça lui demandait un tel effort que je n’arrivais pas à travailler une heure avec lui, il s’endormait littéralement, donc voyez, c’est véritablement des situations tout à fait différentes, d’un individu à l’autre.

Il faut dire que le bénévolat, c’est du bonheur. Ah oui. Ils (les Jardiniers) nous donnent aussi beaucoup, ils nous donnent envie de continuer, l’envie de se battre, parce que c’est un véritable combat qu’on mène, contre l’insécurité, contre le racisme, parce que ça joue aussi énormément. Je sais que je ne dis pas à tout va que je suis bénévole mais quand je le dis, parfois, on me dit « tu as bientôt 80 berges, tu ne peux pas t’occuper de toi au lieu de t’embêter à venir travailler pour les autres ». Moi, ça ne me pose aucun problème, au contraire. Ce n’est pas du sacerdoce, il ne faut pas voir cela sur un plan misérabiliste. On est là parce qu’on a besoin de nous. Et je crois que quand on regarde une petite équipe comme celle d’ici, il y a une solidarité entre nous, on a les mêmes objectifs, on cherche la même chose.

Humanité, c’est certainement un des mots clés de notre action. Quand on voit les injustices qu’il y a tout autour de nous, on n’a pas envie de s’arrêter.

Il y a une remarque que je peux faire, c’est l’absence hurlante des hommes. Il n’y a que des femmes, je crois qu’ici on est peut-être 2, j’en suis pas même pas sûr, je suis peut-être le seul. Je ne sais pas, ils font de la pétanque, ils font de la course à pied, je ne sais pas ce qu’ils font, mais dans toutes ces associations à caractère social, il n’y a pas d’hommes. Dans toutes les associations, ce sont des associations que les femmes font marcher, elles le font aussi bien que nous, les hommes

Je pense qu’il y a d’autres associations qui soutiennent des clubs sportifs de trucs comme cela, il y a certainement d’avantage d’hommes, mais là, ça n’intéresse pas beaucoup les hommes. Pourquoi, je ne peux pas vous dire, je le constate.

Cela fait un peu plus de 10 ans que je fais ce travail, et le manque d’hommes est hurlant.

Moi, je me suis rendu compte un jour que je n’allais jamais vers les autres. Dans une formation que j’ai suivie en tant que bénévole, je l’ai compris. J’ai vu que d’autres avaient une facilité à aller vers les autres que je n’avais pas. J’ai appris à le faire et que je m’y trouve très bien. Je ne donnerai plus ma place.

Jean – Bénévole, c’est du bonheur2021-04-07T06:29:42+02:00

Philippe – un travail qui a du sens, pour transformer notre vie

Etre adhérent aux Jardins de Cocagne, cela représente un engagement, une responsabilité et un espoir. L’engagement d’acheter tous mes légumes toute l’année aux Jardins, et l’espoir d’avoir de meilleurs légumes, de participer à une transformation, une transformation de ma vie, de ce que je mange et de ce que je fais manger à mes enfants parce que c’est important pour moi, une transformation de la manière dont les légumes sont produits, une transformation des systèmes de consommation, et quelque part, ce faisant, du monde et vers où j’aimerais qu’il aille. Et du coup, je peux agir à mon échelle. Je peux agir à mon niveau pour participer à cette transformation.

 

Le volet insertion fait bien sûr partie de notre démarche, même si c’est moins la réalité quotidienne pour moi que les légumes. Travailler, avoir accès à un travail, avoir accès à la société, c’est malheureusement quelque chose d’essentiel dans la société et le fait d’aider les gens à retrouver le sens du travail, ce n’est pas le bon mot car travailler ce n’est pas une fin en soi, mais retrouver une manière d’exister, une manière de s’insérer, et de pouvoir s’assumer, c’est bien sûr quelque chose de très important.

 

Donner un travail qui fait sens, un travail qui est important, produire de la nourriture et de la nourriture bio, pour moi c’est le travail le plus fondamental dans la société, donc, je trouve que c’est chouette qu’on vous donne l’occasion de travailler et de se reconstruire, souvent, pour ces personnes, dans ces conditions-là.

 

Les 20 ans des Jardins, ça me donne à réfléchir, car il y a même 10 ans, je ne pensais pas comme je pense aujourd’hui. Il y a 20 ans, j’allais acheter mes légumes au supermarché, sans l’ombre d’un scrupule, cela me semblait normal, c’est le modèle que j’avais appris de mes parents. Mes enfants se souviendront des Jardins de Cocagne. Je suis très content de venir ici avec mes enfants et je pense que plus tard, ils se souviendront que nous sommes venus ici et qu’ils se souviendront que les légumes poussent dans un maraichage et comme on habite à 800 mètres d’ici, un maraichage qui est juste à côté de la maison. On est venu en vélo ensemble ici et c’est une démarche qui est complète. C’est à dire qu’on est là à proximité, on voit tout ce qu’il se passe, de temps en temps, on va voir le jardin, on voit le tracteur, pour l’instant, c’est surtout le tracteur qui les intéressent, mais voilà, ça fait un sens.

 

Vous savez, une première surprise des Jardins de Cocagne, c’est de se rendre compte que les légumes étaient meilleurs et moins chers qu’au supermarché. J’insiste sur le moins cher. Ils sont bien meilleurs, la qualité est bien meilleure, et le prix est vraiment très acceptable et pour moi, c’est vraiment le signe que c’est l’avenir et qu’on a fait le bon choix en venant ici. Plus de qualité avec le meilleur prix, avec le volet insertion, avec le volet local, avec le volet bonheur de venir ici avec mes enfants et qu’ils voient cela.

 

Et c’est ce que j’espère de l’évolution des Jardins de Cocagne dans le futur, qu’on remette au cœur de la société l’importance de produire localement des légumes de qualité, des produits, des aliments de qualité, des aliments qui fassent sens, des aliments qui fassent cœur avec les gens, que les gens aient vus grandir, que les gens se réjouissent de manger à nouveau, quand je dis réjouir, c’est attendre les tomates tout le printemps en se disant c’est bientôt le temps des tomates, parce qu’ils les ont vus grandir, peut-être qu’ils les ont semées, peut-être qu’ils ont participé à cela. On voit de plus en plus, dans les quartiers, des jardins partagés, des trucs comme cela, dans 20 ans, je pense que ce sera une norme, on verra des jardins sur les toits, il y aura des jardins partout, en ville, dans les parcs, sur les ronds-points …même dès aujourd’hui avec les Incroyables Comestibles qui est une initiative que j’adore.

 

Je suis fier de dire autour de moi que les légumes sont meilleurs et pas plus cher qu’au supermarché. Les gens sont surpris, les gens n’y croient pas, pourtant les gens qui viennent manger chez moi s’en rendent bien compte. Ce que je dis aussi c’est que c’est possible. Souvent, un des freins des gens, c’est de dire, je n’ai pas envie de cuisiner, je ne sais pas quoi faire de ces légumes tous bizarres. Bien sûr l’été c’est facile, mais l’hiver, il faut savoir aussi quoi faire de ses rutabagas, et de ses radis noirs. Mais ça s’est aussi une transformation. Mon rôle d’adhérent, c’est de dire que c’est possible, de montrer l’exemple. Je ne peux pas faire grand-chose de plus, mais c’est pas si peu que ça. Parmi mes voisins, il y a des gens qui sont aussi adhérents. Mon rôle d’adhérent c’est de soutenir, c’est d’être là, de revenir années après années, continuer à acheter et continuer à m’engager pour que le Jardin de Cocagne puisse s’inscrire dans une démarche durable.

 

Dans 20 ans, peut-être que le rôle que la Société demandera aux Jardins de jouer sera une autre forme de réinsertition : réinsérer les gens dans une vie et une alimentation saine, dans un rapport directe à ce qu’ils mangent. Le rôle des Jardins de Cocagne sera de former, de former les gens, le plus grand nombre possible, de transmettre, de planter cette graine, que cette graine qui aujourd’hui produit des légumes, produira des agriculteurs, ou des maraichers mais à l’échelle microscopique, à l’échelle de l’individu, que les gens recommence à produire eux-mêmes leurs légumes. Et cette compétence, le Jardin est certainement en train de la préparer aujourd’hui. Les gens formés au jardin aujourd’hui auront alors un savoir-faire d’une valeur très importante.

 

Philippe, Adhérent des Jardins de Cocagne

Philippe – un travail qui a du sens, pour transformer notre vie2021-04-07T06:28:31+02:00

Alain – Les jardins, une entreprise à dimension humaine et solidaire

Pour moi, les Jardins sont une belle aventure à laquelle j’ai eu le privilège de participer depuis sa création, sa genèse. Je faisais partie du groupe qui, dans les années 1995, travaillait à une préfiguration, de ce qui allait devenir les Jardins de Cocagne. L’association a vu le jour en 1997 et, j’ai été adhérent tout de suite, dès la création.

 Aujourd’hui j’assure la Présidence de l’association mais je tiens à préciser que je ne suis que le représentant du Conseil d’Administration, dans le cadre d’une gouvernance collégiale, ceci est la seule légitimité de mon mandat. Le président est effectivement le représentant de l’association dans ses démarches juridiques, de représentation, mais nous avons souhaité mettre en place un fonctionnement, aux Jardins, qui s’appuie sur la collégialité, et c’est une véritable richesse car nous sommes aux fondements même de la vie associative.

Nous allons bientôt fêter nos 20 ans. C’est un véritable plaisir d’être un des membres de la gouvernance de cette association avec cette fonction de présidence et j’en suis plutôt ravi car aujourd’hui les Jardins vont plutôt bien. Il y a eu des années de bouleversements, de déplacement, de déménagement, voire de turbulences, mais nous avons aujourd’hui atteint un seuil de stabilité même si nous savons pertinemment que la vie des Jardins n’est jamais un long fleuve tranquille et qu’il y aura toujours des péripéties, des aventures, mais aujourd’hui nous sommes plutôt dans une situation positive

C’est toujours un exercice compliqué que de définir en quelques mots un dispositif, qui est complexe dans son organisation, mais je dirais qu’il y a des mots clés incontournables. La Solidarité d’abord, car nous sommes dans une structure où la notion de solidarité et d’humanité est prégnante. « Vous avez besoin de légumes, ils ont besoin de travail, ensemble cultivons la solidarité », ceci est fondamental. Et puis nous sommes une véritable entreprise à dimension humaine. Une véritable entreprise qui aujourd’hui produit dans des conditions professionnelles, des légumes de qualité. Nous contribuons ainsi au développement et à la sensibilisation à l’alimentation saine, ainsi qu’aux circuits courts de distribution, autant de valeurs qui aujourd’hui font largement écho à toutes les problématiques auxquelles nous sommes confrontés et qui sont de vrais sujets de société.

Nous nous revendiquons  aujourd’hui en tant qu’acteur économique du territoire de par la taille de nos espaces cultivés, (8 hectares), de par la production (65tonnes en 2016), de par les moyens techniques que nous mettons  en œuvre, de par les personnels d’encadrement qui sont de véritables professionnels du maraichage. Nous sommes aujourd’hui véritablement passés à une dimension d’entreprise sans pour autant perdre nos valeurs fondamentales qui sont celles de l’accompagnement, de la dimension humaine et la dimension associative. C’est certainement ce qui a le plus changé en 20 ans. Et c’est cette évolution qui nous permet aujourd’hui d’assurer notre pérennité.

Il y a 20 ans nous étions les seuls sur le territoire à être dans un système de distribution en circuit court, nous étions vraiment parmi les très rares producteurs maraîchers bio  sur le secteur. Depuis les choses ont évolué. C’est aussi s’inscrire complétement dans ce mouvement de prise de conscience, même si il n’est encore pas suffisant, de la nécessaire alternative à une agriculture intensive, à du productivisme à tout prix .Nous sommes des contributeurs de cette mutation, et c’est tant mieux.

Un de mes souhaits pour l’avenir  serait de continuer à faire la promotion des bienfaits d’une alimentation saine et de proximité, car cela fait partie des enjeux de notre société. Faire passer cette information-là, être dans un travail d’explication, voilà une des missions des Jardins de Cocagne qu’il sera nécessaire d’intensifier dans les années à venir.

Dans les projets, j’aimerais que nous arrivions à développer une plus grande diversité de production, comme la production fruitière bio. Nous allons notamment implanter un nouveau verger très prochainement.

Pour conclure, je crois que nous pouvons affirmer que les Jardins sont une belle  aventure collective en mouvement. Il nous faut l’enrichir de projets nouveaux, de productions nouvelles mais aussi de toute la dimension humaine pour que chacun ici puisse se sentir bien à sa place. Que chaque salarié qui vienne travailler mesure l’importance de sa mission. Qu’il puisse se dire que son travail est reconnu et qu’il appartient à un collectif, une véritable équipe, qu’il a un véritable rôle social dans la société, comme tout salarié d’entreprise. Mais son passage aux jardins ne sera que temporaire car il va assurément retrouver  le chemin de l’emploi durable ! Utopie !! Vous avez dit utopie ? N’est-ce pas cela qui nous anime et donne du sens à toutes nos actions !!!

 

Alain Sève, président de l’Association des Jardins de Cocagne de Mâcon

Alain – Les jardins, une entreprise à dimension humaine et solidaire2021-04-07T06:28:23+02:00
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